– Cette semaine, Raphaël nous transporte de nouveau dans le monde souterrain, avec ces énigmatiques Petites Mottes!
Les grottes d’Ardèche regorgent de paysages étranges. Celle de Saint Marcel, au cœur des gorges de l’Ardèche est certainement la plus diversifiée du point de vue des formations qui s’offrent au visiteur. Si une toute petite partie de la grotte est aménagée pour le tourisme, les spéléologues et plongeurs (puisque certains réseaux demeurent engloutis!) disposent, eux, de 56km de galeries (connues, naturellement). Découverts comme bien souvent accidentellement, au XIXe siècle, les larges et étroits tunnels commenceront à être fréquentés par les humains dans les années 1930. Car c’est simplement l’eau, qui au cours des millénaires, par les crues fora ces salles et ces boyaux, et par suintement façonna le paysage.
Nous connaissons tous les stalactites et les stalagmites, ces formations calcaires qui tombent ou remontent. Nous avons déjà parlé de ces formations! Mais d’autres demeurent plus complexes. Tout d’abord, ces draperies, formées par des gouttes glissant sur l’arête de dentelle de calcite, pouvant former de petites pointes acérées nommées dents de cochon. De minuscules cristallisations qui donnent au ciel une texture de chou-fleur! Ces dernières ont également un aspect pailleté, relativement difficile à photographier, mais que l’on peut deviner dans le bord supérieur gauche de l’image.
Plus surprenant ici, ce sont ces petites mottes à l’aplomb d’autres concrétions. Ces formations se retrouvent en abondance dans cette grotte. D’abord, il ne faut pas se fier à l’aspect paisible de ce paysage. Il peut arriver que la grotte devienne le siège de violentes crues. Au printemps ou à l’automne, lorsque surviennent des pluies diluviennes, des quantités torrentielles d’eau viennent balayer le sol, en emportant, cassant, déplaçant parfois d’énormes piliers millénaires. Gare au visiteur mal informé de la météo qui dans certains cas ne pourra jamais conter ce genre de crue à ses enfants!
Mais repassons la scène au ralenti. L’eau, déjà chargée d’alluvions, de matières en décomposition, ou de matériaux qu’elle a accumulé en traversant les terrains, arrive après un dédale de lapiaz, d’anfractuosités, de failles, puis de méandres, dans une galerie. Là, elle s’écoule partout, et peut stagner à certains endroits. Alors, tout son chargement se dépose au sol. Or, on l’a dit, au sol il peut y avoir tout un tas de concrétions, de coulées, etc… Les stalagmites comme toutes autres formations vont se retrouver couvertes d’argile. Après décantation, et le retrait de l’eau quand revient la sécheresse, l’argile, lui, reste collé à toutes les surfaces. Par la suite, de nouvelles cristallisations font fleurir sur cette couche d’argile, à l’aplomb des suintements. C’est ainsi que nous obtenons ces petites mottes claires! D’ailleurs, toutes les concrétions sont logées à la même enseigne: regardez-donc au fond de la salle et au premier plan, il se trouve que certaines stalactites subirent le même sort! Comment le sait-on? Et bien parce qu’au fond à gauche nous voyons une démarcation entre une partie claire et une partie brune de la paroi. Cette limite s’appelle le trait de mise en charge et indique le niveau maximum d’eau atteint à cet endroit. Comme il doit avoisiner les 1m50 au dessus du sol, heureusement que nous n’étions pas là à ce moment là! Nous n’aurions pas pu vous raconter ça…
Alors voilà, pour pratiquer la spéléologie, c’est souvent mieux d’attendre que le niveau baisse, et que l’eau s’évacue, comme nous allons évacuer nos postes de travail. Pourquoi? Pour aller en week-end, pardi!