– Cette fois, c’est au tour de Raphaël, qui, avec une belle longueur d’avance sur la page facebook de La Boîte A2, remporte la possibilité d’exposer sa photo, “Les Piliers de Néron”.
Le Néron, aussi connu sous le nom de Casque du Néron, c’est un sommet de plus de 1200 mètres bien connu des grenoblois. Il se dresse en effet entre Saint Martin-le-Vinoux et Saint Egrève, deux villes de l’agglomération, dont l’urbanisation tend à l’encercler du côté Sud-Ouest. C’est tout l’inverse sur son côté opposé où des localités comme Quaix-en-Chartreuse ou Clémencières offrent des paysages plus champêtres. Sa forme allongée selon une longue arrête décrivant une vaste parabole peut aussi faire penser à un casque romain. Allez, vous avez tous lu Astérix, on le sait! Le Néron comporte d’ailleurs un poste romain non loin de son extrémité Sud, pouvant être confondu avec un porche se situant lui à flanc de falaise et offrant une vue imprenable sur le quartier de la gare de Grenoble, faisant de lui un lieu de premier choix pour l’inspiration des modélistes ferroviaires! L’emplacement stratégique de la montagne, non loin d’une cité (portant le nom de l’empereur Gratien, n’est-ce-pas, encore un romain!), a d’ailleurs été de nouveau exploité en 1893 lorsque la batterie du Néron fut édifiée dans le cadre du dispositif de défense de la ceinture fortifiée de Grenoble, un système de forts conçus par Séré de Rivières après la défaite de la guerre de 1870. Le fonctionnement de ce fort ne fut que bref, c’est suite à de nombreux chasseurs alpins disparus dans les hautes falaises lors d’entrainement que sa fonction fut revue. Il est ici intéressant de parler d’Ullrich, un étudiant allemand qui, en 1906, voulut vite rejoindre St Egrève par la traversée de l’arête sommitale de “l’Alpe Périlleuse” (in Les Alpes Pittoresques n°1 – Juin 1901) et donna d’office son nom au ravin bien connu des randonneurs. Nous parlions donc d’une batterie militaire, le célèbre empereur Néron n’étant pas spécifiquement connu pour son adoration de Johnny, l’empereur préférant certainement allumer des feux, notamment dans sa ville.
Car si le nom du Casque du Néron porte ce nom à cause de sa forme, Néron provient lui de Nero, le noir, du fait des épaisses forêts qui l’entourent. Vous pouvez donc ranger vos prophéties de Nostradamus mettant un pseudo-lien entre l’incendie de Rome de juillet 64 et l’incendie de cette montagne en août 2003. Les bon grammairiens qui nous lisent auront par ailleurs remarqué l’absence de la préposition “de” engendrant l’appartenance du casque à Néron, mais plutôt la présence de l’apposition “du Néron” complétant l’identité du site. Car ce n’est pas n’importe quel casque, c’est le Casque du Néron, à l’instar de la Tête de l’Obiou ou de la Dent de Die (“dedidadouda, dabadabada“). Bref, si vous tenez à connaître un rapport, sachez qu’il y en a bien plus avec la BD, comme la forme des casques romains dans Astérix, ou encore avec Lucky-Luke qui veille sur Grenoble depuis quelques années!
Mais je ne vais pas m’égarer tel un poor lonesome cow-boy et je donnerai alors en guise de cerise sur le gâteau le pourquoi-du-comment de ces mystérieux piliers qui, tels des menhirs oubliés façon Stonehenge, hantent toujours les flancs du mont Rachais, voisin du Néron. Ces piles, ce sont les restes d’un ancien pont, supportant autrefois une voie ferrée étroite. Surplombant la presqu’île grenobloise, elle atteignait un tunnel donnant accès à une ancienne carrière souterraine, le 480 (car nous nous situons approximativement à l’altitude 480). Cette voie de roulage permettait de relier le réseau souterrain au haut d’un téléphérique qui descendait alors les blocs de calcaire berriasien dans la vallée jusqu’avant les années 20. La carrière faisait partie d’un immense réseau, celui exploité par la société des Ciments de la Porte de France, bien connus pour avoir été les meilleurs du marché en une époque aujourd’hui révolue. Située à la Porte de France, à l’entrée de Grenoble, l’usine accueillait le bas de ce téléphérique, premier modèle urbain du monde, môssieur! Comme quoi, nous sommes toujours redirigés vers l’histoire du ciment lorsque j’écris! C’est que le bassin grenoblois en fut le berceau, et c’est ici même, dans ces carrières, que le procédé fut mis au point et étudié au cours du XIXe siècle par, entre autres, la société Vicat. Cette dernière reprit d’ailleurs toutes les carrières du secteur, avant d’en achever l’exploitation en 2012, après avoir creusé plusieurs centaines de kilomètres de galeries souterraines sous-minant ces contreforts de la Chartreuse rappelant occasionnellement aux riverains des villages alentours le danger qu’elles constituent. Alors je file en exploration passer mon week-end sous terre!
À la semaine prochaine!
Voici une façon bien humoristique de nous faire voyager dans l’histoire… Félicitations pour cette présentation passionnante.